Evolution sectorielle
Le regroupement au sein d’un réseau est une des réponses à l’évolution du secteur. Un regroupement peut s’effectuer à différentes échelles géographiques, au niveau des communes, d’un territoire ou au niveau régional et national. Un regroupement peut prendre différentes formes juridiques, il peut s’agir soit des consolidations entre groupes avec des fusions de SEL (la forme juridique qui est devenue le standard depuis 1990) ou des SPFPL, et plus récemment de rassemblements de centres au sein d’un réseau comme France Imageries Territoires.
Inexorablement les radiologues se sont regroupés avec une accélération depuis 10 ans, l’exercice individuel est devenu l’exception. Les coopérations ont été souhaitées par les ARS dans le cadre des demandes d’autorisations d’EML (équipement lourd IRM et scanners). Ces coopérations entre les groupes de radiologues d’un même territoire amenés à travailler ensemble, impliqués dans des structures juridiques communes, partageant des investissements, et étant co-employeurs ont évolué dans de nombreux cas vers des regroupements. Plus de 50 groupes en France rassemblent plus de 20 radiologues avec une gouvernance souvent complexe liée à des tensions compte-tenu de différences d’exercice. C’est pourquoi depuis trois quatre ans, plusieurs groupes ont souhaité s’adosser à des réseaux pour faire face aux mutations sectorielles sur un nouveau modèle. Il faut aussi noter que des « grandes fusions » entre groupes ont eu lieu avec des tailles de groupe dépassant 60 radiologues et une organisation de la totalité de l’offre libérale sur des échelles départementales.
Ces regroupements s’opèrent car historiquement le secteur est fragmenté avec des exercices individuels, alors que l’évolution des pratiques professionnelles et la gradation de l’offre d’imagerie (mise en œuvre le cas échant d’autorisation ARS scanner et IRM) nécessitent une mutualisation.
Les déterminants qui incitent aux regroupements (listés ci-dessous) sont une conséquence directe de nos institutions, d’une consolidation provoquée par les politiques de santé pour des enjeux de structuration de l’offre, de qualité et des enjeux budgétaires :
L'effet ciseau
L’effet ciseau c’est-à-dire la baisse de tarifs ou dans le meilleur des cas stagnation dans un contexte national d’inflation de toutes les charges… dans un contexte où les marges de manœuvre sont réduites notamment sur les coûts de scanner et IRM compte-tenu d’un oligopole de 3/4 acteurs en France
- Des augmentations conventionnelles pour des tarifs qui baissent
- Explosion des dépenses d’électricité notamment sur les établissements de santé public avec des établissements où la dépense à fait x 2,5
- Charge de gestion des ressources humaines très complexe : les revalorisations du SMIC sans revalorisation des tarifs ont entrainé une « smicardisation » des secrétaires médicales. Le post-covid a changé les mentalités des professionnels de santé, multiplication des temps partiels, multiplication des absences, accentuation de la complexité de gestion de fin de carrière avec des collaborateurs recherchant le licenciement pour inaptitude, etc.
- Absence de prime Segur pour les manipulateurs, les centres libéraux ont dû augmenter le personnel pour les retenir sans revalorisation de leurs tarifs. Les manipulateurs en imagerie libérale sont les seuls professionnels de santé à ne pas avoir été revalorisés par le Segur. Les centres libéraux ont dû assumer seuls cette revalorisation
- Des textes législatifs qui font peser des risques opérationnels et des risques financiers… annonce d’une loi rétroactive jusqu’en 2019 sur l’acquisition de CP en arrêt maladie des collaborateurs en place et des anciens collaborateurs
La charge mentale du radiologue
- Des délais inexorablement croissants sur de nombreux territoires malgré une charge d’interprétation en forte croissance. Ex : un délai de 6 à 10 mois pour une mammographie dans l’Eure, le Sud Charente Maritime, Bergerac, le cœur du Morbihan… est la réalité territoriale à laquelle est confrontée une partie des patients
- Charge médicale et impact économique de la permanence de soins
- Défi de la transmission intergénérationnelle, avec au niveau national un radiologue sur deux de plus de 60 ans et trois sortants pour un entrant, conséquence du numerus clausus
- Inégalité territoriale, avec un écart de x24 entre le département le mieux doté et le moins doté en temps radiologue (ratio du nombre de radiologues pour 10 000 habitants)
- Inégalité territoriale dans l’accès aux scanners et IRM. Ainsi, l’Ile de France dispose d’une IRM pour 25 000 habitants, la moyenne nationale est d’une IRM pour 43 000 habitants et les départements moins dotés dispose qu’une une IRM pour 80 000 habitants. Absence de gradation de l’offre d’imagerie, absence d’évolution des pratiques professionnelles, explosion des délais, fragilité du maillage territorial… autant de défis qu’un centre seul ne peut gérer
Les charges de gestion
Charges de gestion croissantes et directement corrélées à la taille des structures, leur implication dans les projets médicaux des établissements (ex : RCP), dans des GIE public-privé et la participation à la permanence des soins
- Pénurie de ressources manipulateurs : 6000 manipulateurs manquants pour une population de 28 000 manipulateurs
- Réformes réglementaires toujours plus complexes imposées aux centres comme la réforme des produits de contraste, etc. Comment un centre de 7/8 radiologues pourrait-il négocier face à 4 laboratoires en monopole européen ?
- Complexité réglementaire avec la réforme des autorisations : une charge administrative et une technicité que les radiologues n’ont plus
- Pression des cliniques privées sur les groupes de radiologues notamment dans le cadre des autorisations d’imagerie en coupe, que la réforme des autorisations accentue
Le défi d'innovation
Défi d’innovation avec une composante technologique forte
- Une accélération de la digitalisation du parcours patient (de la prise de rdv à la diffusion des comptes-rendus)
- L’émergence de l’Intelligence Artificielle
- Une accélération des contraintes numériques avec des investissements toujours croissants en RIS et PACS, avec des comptes qui n’y sont pas sur le Segur numérique
- Des investissements dans les infrastructures informatiques (hébergement des données de santé) notamment par rapport aux enjeux de cybersécurité
- Pour les coopérations de type télé-interprétation, les délais de paiement atteignent 150 jours en moyenne avec les hôpitaux, qui ne respectent pas les délais légaux pour de nombreuses raisons internes ou économiques. Ces délais fragilisent les organisations aussi robustes soient-elles compte-tenu des impacts sur le besoin de fonds de roulement